Chercheur en écologie, François Schneider (voir son CV), a travaillé dans différents instituts d'environnement en France, Pays-Bas, Autriche, Estonie et Portugal. François n’a jamais réussi à se faire à l'idée que la solution aux problèmes écologiques et sociaux de la planète devait passer par encore plus de croissance économique dans les zones favorisées du globe; car c'est bien souvent l'interprétation qui est faite du concept tant répandu de « développement durable ».

François Schneider a contribué au développement du concept de « décroissance soutenable », notamment par la dénonciation de « l'effet rebond » par lequel les gains que les progrès technologiques peuvent théoriquement nous apporter se trouvent anéantis par une croissance de la consommation. Il a participé au colloque sur la décroissance en octobre 2003 à Lyon. Il est détenteur d'une thèse de doctorat sur les écobilans des produits recyclés et a travaillé et écrit des articles scientifiques sur de nombreux sujets tels que le traitement des déchets, les transports, l'effet rebond, les extracteurs que sont bulldozers et explosifs, les flux de carbone, la consommation d’eau et de matériaux. François Schneider privilégie une approche préventive aux problèmes écologiques basée sur l’importance de réduire l’extraction de matière première tout en tenant compte des impacts indirects de nos consommations dans d’autres contrées.

« La décroissance n'est pas juste un mot clé ou un slogan. C'est un processus bien concret et rationnel allant vers une décroissance de la consommation de ressources naturelles au niveau global. A cause du niveau de décroissance qu'il est nécessaire d'atteindre dans les pays riches (on parle à ce sujet d'un ordre de grandeur de facteur 10), et de l'effet rebond (voir articles), le processus physique de décroissance doit forcément s'accompagner d'une décroissance économique des pays riches.

Comme de nombreux économistes pensent que c'est tout à fait impossible, que nos économies sont fondamentalement liées à la croissance, certains proposent de sortir de l'économie, de jeter aux oubliettes les sciences économiques et de mettre au chômage tous les économistes. "celui qui croit à une croissance infinie dans un monde fini est un fou ou un économiste" dit-on. Je pense pour ma part qu'il faut en effet sortir de l'idée d' «économie croissanciste», de cette vision économiste enfermée dans une croissance sans fin. Nous sommes encore à l'heure d'une économie "intersidérale" qui ne répond plus à des besoins, qui se suffit à elle-même, qui autogénère ses priorités.

Mais nous ne sortirons pas de l'économie dans le sens où nous continueront à échanger des biens et des services dans le futur, fut-ce à un niveau moindre. Et nous avons besoin d'énormes avancées dans les sciences économiques. Il s'agit là d'une énorme ouverture de recherche et de réflexion. L'économie n'a pas encore intégré l'option de décroissance ! C'est un peu comme si les mathématiques n'avaient pas inventé le signe moins !

La proposition de la décroissance soutenable est qu'un processus se mette en place, non pas pour lancer une économie de décroissance sur un modèle inversé de l'économie de croissance. Il s'agit de passer à une phase temporaire de décroissance économique qui corresponde à un atterrissage en douceur de l'économie à un niveau soutenable de consommation pour éviter tout simplement de "jouer à la météorite". Il s'agit pour les économistes de sortir de leur croyance dans la croissance, d'imaginer une économie du futur où tout le monde puisse vivre sur cette planète de manière décente où les conditions de vie soient propices à la survie des humains et des écosystèmes dont ils sont dépendants. C'est un grand défi qui s'ouvre pour les économistes et pour tous les chercheurs de toutes les disciplines. Imaginons des scénarios pour combiner ensemble des politiques de décroissance qui appliquées indépendamment nous conduiraient à de graves crises. Il doit exister un chemin, dans le cadre de la démocratie bien sûr, il faut le trouver, combinant de manière équilibrée une diminution de la consommation, une réduction de la production et une baisse et un partage du temps de travail pour que personne ne soit exclu. »

François Schneider