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« Ce qu'il y a de fascinant chez [Nicolas Sarkozy], c'est son énergie, sa capacité d'avancer. Mon fils me dit souvent : “Arrête d'attaquer Sarko, il est comme toi !” » Daniel Cohn-Bendit, Le Monde, 18-4-2009. « Dis à ton fils qu’il a raison. On se ressemble beaucoup. » Nicolas Sarkozy, Libération, 19-6-2009 « Sarkozy fait Dany-ami »

 

Les listes Cohn-Bendit ont-elles été poussées par l’UMP contre les listes du centre et de gauche ?

L’affaire « Home », le film de Yann Arthus-Bertrand interroge. Le 23 juin, le quotidien Le Monde révélait qu'un des ministres d’Etat du gouvernement, Jean-Louis Borloo, avait envoyé une lettre aux préfets de région, à la veille du début de la campagne officielle pour les élections européennes, leur prescrivant de diffuser le film produit par l'ami du Président de la république François Pinault (ici). « Nous rentrions dans une période de réserve. Il n’était pas question pour moi d'organiser une séance publique. » « De ma carrière, je n’avais jamais reçu une telle demande à la veille d’une échéance électorale », déclarent des préfets au Monde. A la télévision publique, sur France 2, le film était diffusé deux jours avant les élections européennes. Dans le même temps, le président du groupe PPR, François Pinault, pouvait faire pression sur les médias pour lancer une extraordinaire campagne de promotion du film qu’il venait de financer. Les premières images du film représentent les dizaines de marques de luxe et de grandes franchises du groupe PPR qui s’assemblent pour former le mot « Home ». L'avertissement du groupe PPR à l'attention des journalistes est clair : on ne critique pas sous peine de perdre autant d’annonceurs. Le système reproduit, en plus puissant encore, le « Pacte Écologique » de l'animateur de TF1 Nicolas Hulot. L'omerta que recouvre cette gigantesque opération de propagande fonctionne à plein : sous couvert de protection de l'’environnement, l'idéologie que diffuse ce film en filigrane est destinée à légitimer le capitalisme sous couvert d'application des lois naturelles. Cette perspective est bien décrite dans une récente émission de Daniel Mermet « Là-bas si j’y suis » (ici). Née de la volonté de citoyens de contester le modèle productiviste fondé sur la croissance, l’écologie est devenue pour les multinationales un moyen publicitaire de se refaire une virginité.

Parallèlement, les initiateurs des listes « Europe-écologie » se sont clairement affichés comme les prolongateurs du mouvement associatif environnementaliste qui avait contribué au Grenelle de l’environnement de Nicolas Sarkozy. Loin de remettre en cause le modèle productiviste lié aux multinationales, l'’écologie défendue dans cette perspective est celle du « développement durable » et de la « croissance verte » destinée à « convertir au vert » le capitalisme (ici). Leader de cette liste, présenté comme « l'enfant chéri des médias » par la revue Médias, Daniel Cohn-Bendit a été un acteur de la construction de l’Europe du libre-marché (ici). En accord, voire en avance, sur les thèses néolibérales, le député européen vert s’était prononcé pour le travail le dimanche, pour la privatisation des services publics, pour le SMIC jeune... Le leader altermondialiste José Bové, quant à lui, avait donné des gages de bonne volonté en intervenant sur France Inter pour féliciter une ex secrétaire d’Etat à l’écologie du gouvernement Sarkozy (ici). Dans ce contexte, on peut facilement comprendre tout l’intérêt que le gouvernement ait pu avoir à pousser la liste Europe-écologie contre le Parti socialiste, la gauche radicale et le centre. Le soir des élections, Jean-Louis Borloo ne cachait d'ailleurs pas sa satisfaction sur les plateaux de télévision et déclarait sa connivence avec les listes Cohn-Bendit.

Yann Arthus-Bertrand a affiché son soutien à la liste Europe-écologie à la veille des élections (ici). Un soutien dont s'est félicité les listes de Daniel Cohn-Bendit. Les mêmes questions se posent que lors du Grenelle du l’environnement : Les Verts ont-ils été poussés par le gouvernement Sarkozy dans l'objectif de combattre les thèses remettant en cause le capitalisme ? Dans ce cas, comment des associations environnementalistes, des intellectuels, des médias qui se revendiquent critiques, ont-ils pu soutenir les listes Europe-Ecologie ? Comment ont-ils pu, une nouvelle fois, se laisser instrumentaliser par le gouvernement Sarkozy ?

Bruno Clémentin et Vincent Cheynet, le 26 juin 2009

La Décroissance 61
En kiosque le mercredi 1er juillet 2009

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« Celui qui
croit que la croissance peut être infinie dans un monde fini est soit un fou, soit un économiste. »
Kenneth Boulding (1910-1993), président de l'American Economic Association.

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